Par Olivier MELNICK.
Traduction et adaptation par Guy ATHIA.
Dimanche dernier, si vous étiez à Paris, vous regardiez
peut-être la finale de la Coupe du Monde de football, le Tour de France ou, plus
simplement, vous profitiez à fond de ce long pont du 14 Juillet pour vous
délasser des tracas de ce début d’été. À moins bien-sûr que vous marchiez en
direction de la "Place de la Bastille", foulant le pavé avec les 10 à
20.000 manifestants pro-Hamas.
Évidemment, ce n’est pas la première fois que les
partisans propalestiniens et pro-Hamas empruntent les rues de Paris pour crier
leur haine d’Israël et des Juifs, mais aussi effrayant que cela paraisse, ce
type de manifestation est relativement courant. Cette fois, c’était pour
protester contre la guerre à Gaza et le soi-disant « massacre » des Palestiniens
par une armée israélienne « assoiffée de sang ». Bien entendu, pour
les manifestants, tous les Juifs de France partagent la même responsabilité, au
moins par procuration.
Ceci étant, pour plusieurs raisons, la manifestation de dimanche dernier était
différente des autres. Tout d’abord par son ampleur, c’était la première fois
qu’une foule aussi nombreuse était rassemblée. 10.000 à 20.000 personnes ne
passent pas inaperçues dans les rues de Paris, d’autant qu’on pouvait entendre
crier : « Mort aux Juifs » ; « N*#@ les Juifs », « Hitler
avait raison », « Nous allons vous brûler » ou « Jihad ,
Jihad, Jihad ». Lorsque certains des manifestants ont appelé à la prière,
plusieurs milliers ont commencé à crier « Allahou Akbar ». Il n’était alors plus possible d’émettre des
doutes sur l’origine ethnique et religieuse de la foule en colère. La liberté d’expression,
de religion ou de conscience sont naturellement en vigueur en France, toutefois,
la nature des slogans qui ne souffrent d’aucune ambiguïté, font poser bien des
questions, à moi-même comme à beaucoup d’autres. En France, la cause palestinienne
a toujours été bien reçue, par un grand nombre d’intellectuels, de journalistes
et de politiques et même par une large opinion publique. Aujourd’hui toutefois,
cette même cause s’affiche comme l’alibi d’un antisémitisme assumé.
Dimanche dernier, les commerçants, les
restaurateurs et la plupart des passants ont été stupéfaits et sont restés
bouche bée en voyant défiler le cortège de la haine anti-juive dans les rues de
Paris. Étaient-ils en état de choc ou simplement lâches, incapables de réagir comme
dans les années 30 et 40 ? Sans doute un peu des deux, mais je crains que le « virus
du lâche » ait à nouveau infecté la France. Que faire lorsqu’on est
seulement quelques-uns face à une foule entière? C’est sans doute la question
que se sont posés tous ceux qui restèrent cachés derrière leurs volets quand la
Gestapo vint prendre mon grand-père maternel à son domicile à Paris pour le
mettre dans un wagon à bestiaux à destination d’Auschwitz.
Lors de ces manifestations haineuses, les Juifs
restent généralement à l’écart du danger, le plus souvent dans leurs foyers, la
meilleure chose à faire pour des Juifs très inquiets. Cependant, dimanche
dernier, un groupe de manifestants s’est volontairement dirigé vers la synagogue
de la rue de la Roquette où 200 personnes étaient réunies pour rendre hommage
aux trois jeunes israéliens kidnappés et assassinés il y a quelques semaines.
Soudainement, les manifestants en colère ont décidé
de jeter les chaises d’une terrasse de café (certaines d’entre elles étaient en
feu) sur le bâtiment de la synagogue, tout en continuant à crier « Mort
aux Juifs! ». Les 7 policiers présents se sont vite retrouvés démunis face
à l’ampleur de la situation. Se joignant au service de protection de la
communauté juive, ils ont tenu ferme jusqu’à l’arrivée en renfort des CRS, 10
minutes plus tard. Sans leur intervention, toute cette affaire aurait pu se
terminer en un bain de sang. Seules trois personnes juives ont été blessées,
ainsi que quatre membres de la police.
La dernière fois que des Juifs ont été ainsi poursuivis
pour être menés à la mort, c’était durant l’occupation nazie, avec le soutien
actif des miliciens du gouvernement de Vichy. On peut regretter le manque de
prévoyance des responsables de la police qui n’ont pas su réagir à temps et avec
les moyens adéquats. Cependant, c’est surtout l’unanimité des médias pour
minimiser les faits qui est inquiétante. Le manque de réaction vigoureuse et
lucide des dirigeants politiques laisse augurer le pire. Cela me fait penser à
l’époque des pogroms de Russie, de la passivité des autorités et de la
participation active de certaines milices.
Il y a seulement quelques générations, ma
grand-mère, Rachel Schimkowitz, échappait à ces massacres et venait s’installer
en France. Les pogroms étaient alors des émeutes organisées par les autorités
contre les Juifs. La plupart eurent lieu en Russie au cours de la seconde
moitié du 19e siècle et jusqu’au début du 20e siècle. Ils causèrent la mort de
milliers de Juifs et poussèrent à l’exil des milliers d’autres vers l’Amérique
et Eretz Yisraël.
Il est possible de voir dans les évènements de
dimanche dernier la tentative de certaines personnes d’organiser de nouveaux
pogroms en France, suivant ainsi le modèle russe d’il y a 150 ans. La réaction « disproportionnée »
des autorités et la complicité, au moins par omission, des médias inquiètent la
communauté française et les Juifs en particulier, les premiers visés par cette
violence. La « concurrence » de la Coupe du monde de football ou le
Tour de France n’expliquent pas tout et les médias ont depuis longtemps une
lourde responsabilité dans la dissémination de la haine anti-juive dans notre
pays. Le Président François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls ont
certes dénoncé la violence, mais ils se refusent toujours à identifier
ouvertement sa nature et à prendre les mesures qui s’imposent. Les Français qui
sont juifs ont parfaitement compris où était leur avenir et ils sont maintenant
de plus en plus nombreux à choisir la « sécurité » plus effective
d’Israël, même au milieu des roquettes.
Alors que la fête nationale est derrière nous, que
la fièvre du football est tombée et que le Tour de France est loin de Paris, il
convient de se poser froidement la question: que se serait-il passé si la foule
avait réussi à franchir le seuil de la synagogue pour atteindre les Juifs
réunis ? Il est inutile de se voiler la face, nous connaissons la réponse.
Par la grâce de Dieu, un pogrom a été évité
dimanche dernier. Les antisémites ne se satisfont plus des mots, insultes et
menaces en tout genre. L’atteinte aux biens des Juifs n’est qu’une étape pour
eux. Ils sont à présent déterminés à s’en prendre aux individus juifs eux-mêmes.
Les Juifs de France sont comme entre les deux mâchoires d’un étau de haine,
d’une part celle de l’extrême droite dont Lepen est l’une des figures
emblématiques, de l’autre, celle d’une frange importante et virulente de la
communauté musulmane.
Le plus affligeant pour moi est que les mâchoires de l’étau se rapprochent
inexorablement sous l’effet de l’indifférence de la plupart des Français. Et
cette indifférence ne fait que faciliter l’activité des criminels.
Dimanche dernier, à Paris, un « premier pogrom »
a été évité de justesse. Si celui-ci a pu se produire de manière opportune en
marge d’une manifestation, il se pourrait bien qu’à l’avenir, de futures
actions soient mieux anticipées et finissent par faire de nombreuses victimes
juives. Pour les Juifs de France, l’heure du retour en Israël a sans doute
sonné et les signes d’une alyia
massive sont déjà visibles depuis quelques années. Ce que nous avons vu
dimanche dernier va finir d’effacer les doutes qui demeuraient encore pour
quelques-uns.
La route qui
mène à Auschwitz fut construite par la haine, mais pavée par l’indifférence -
Abraham Joshua Heschel
Pour plus d'informations: rejoignez le blog d'Olivier MELNICK sur le nouvel antisémitisme: www.newantisemitism.com
bonjour Monsieur,
RépondreSupprimerêtes vous parent avec Myriam S. fille de Raymond S.
cordialement
Alain Mathieu
A priori non!
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