mercredi 27 janvier 2016

Le négationnisme de la Shoah est-il vraiment à propos de la Shoah ?

Par Olivier MELNICK (traduit de l'Anglais)

En 2005, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté la résolution 60/7 choisissant officiellement le 27 janvier comme Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de la Shoah. Il s’agit du jour où le monde entier est supposé se souvenir de la Shoah et de ses victimes. 2016 marque le 71e anniversaire de la libération des camps d’Auschwitz-Birkenau. Aujourd’hui, plus que jamais, le mot d’ordre «PLUS JAMAIS» doit être répété aux plus âgées d’entre nous et enseigné aux plus jeunes, car bien peu des survivants de la Shoah sont encore en vie de nos jours. Nous courrons donc le risque d’oublier l’un des plus importants, sinon le plus tragique des génocides de l’histoire humaine.


      
Cette date est différente de celle retenue dans le monde juif pour la commémoration de Yom HaShoah et qui a lieu chaque printemps en Israël. La Journée internationale est un événement parrainé par l’Organisation des Nations Unies. Quand bien même j’ai perdu toute confiance en la capacité ou même la volonté de l’ONU à tenir une posture honnête envers Israël, j’ai apprécié la déclaration du Secrétaire Général Ban Ki-Moon : «Nier les faits historiques, surtout sur ​​un sujet aussi important que celui de la Shoah, n’est tout simplement pas acceptable. Il est tout aussi inacceptable d’appeler à l’élimination de tout État ou peuple. J’aimerais voir ce principe fondamental respecté à la fois dans la rhétorique et en pratique par tous les membres de la communauté internationale». Bien entendu, si l’on considère toutes les pressions exercées à l’ONU par de nombreux pays qui sont des ennemis déclarés de l’État juif, on imagine sans peine la tension existante et permanente entre l’affirmation des faits avérés historiques et le politiquement correct de rigueur dans ce cercle.

En 1978, l’antisémite ardent Willis CARTO a fondé l’Institut pour le Révisionnisme Historique (IHR). M. CARTO est décédé l’année passée, mais le site web de son Institut est toujours en place. De plus, ses administrateurs prétendent ne pas être des négationnistes. Leur site internet présente de nombreux livres, vidéos, CD et DVD faisant la promotion de leur point de vue. Il convient de remarquer qu’un site intitulé «
Institut pour le Révisionnisme Historique» traite bien évidemment presque exclusivement du négationnisme de la Shoah et des théories de cabale juive. IHR est l’un des nombreux sites vantant les thèses du révisionnisme historique. Ils ont en commun de focaliser leur attention sur Israël, les Juifs et la Shoah plus que tout autre sujet. Leur «révisionnisme» a donc une thématique quasi unique qui montre clairement leur antisémitisme patent.

D’un côté, c’est seulement quand il s’agit de la Shoah que les critiques fusent, portées par de pseudo-arguments scientifiques relatifs à la catastrophe juive. Des individus comme David IRVING, Louis FAURISSON, Roger GARAUDY, Louis FARRAKHAN ou même Bobby FISHER ne sont que quelques-unes des personnalités connues du « panthéon » de l’antisémitisme et du négationnisme. Cela semble être une obsession pour ces hommes (et beaucoup d’autres) de «prouver» que la catastrophe juive était un gigantesque supercherie.
D’un autre côté, très peu de personnes, s’il en est, n’ont souhaitées écrire de livres pour minimiser ou même nier d’autres événements tels que les massacres au Soudan, la guerre au Kosovo, le génocide arménien ou même les massacres sous Staline. Toutes ces tragédies (et bien d’autres encore à travers l’histoire) entrainèrent la mort de millions de personnes innocentes. Pourtant, lorsque l’on évalue l’intérêt porté à la négation de la Shoah, par rapport à tout autre génocide ou conflit sanglant dans l’histoire, il apparait un déséquilibre flagrant. Comment l’expliquer?

En outre, il ne viendrait à l’esprit de personne de tenir un groupe ethnique ou «sous-groupe» collectivement responsable de quelque génocide ou meurtres de masse, tandis qu’une petite partie seulement de ce même groupe serait à incriminer. Mais s’agissant des Juifs et d’Israël vis-à-vis des Arabes palestiniens, la perspective change subitement et radicalement pour établir une culpabilité assurément collective. Ceci étant, «l’accusation» est bien incapable de «démontrer» que les Juifs israéliens sont coupables de «nettoyage ethnique» à l’encontre des Palestiniens; ce qu’ils ne sont pas bien entendu. Mais, à supposer un instant qu’ils le soient, la question se pose alors : «Pourquoi tous les Juifs du monde devraient-ils être responsables de ce que les Israéliens “infligeraient” aux Palestiniens?» Logiquement, aucune responsabilité collective ne devrait s’appliquer à eux, n’est-ce pas? Mais malheureusement, l’antisémitisme entre dans une tout autre «logique».

Si nous suivons le même « raisonnement » énoncé plus haut, tous les Turcs et de tous les temps devraient être tenus collectivement responsables du génocide arménien perpétré au début du 20e siècle. Il y a probablement, à l’échelle du monde, un bien faible nombre de personnes détestant les Turcs, mais même parmi celles-ci, aucune n’aurait l’idée de considérer tous les Turcs, peut-être même de tous les temps, responsables en quelque sorte par procuration. Pourtant, c’est ce même principe de responsabilité «collective» qui s’est imposé à chaque Juif, en tout lieu et en tout temps de l’Histoire. Même les personnes juives aujourd’hui — aussi difficile que cela puisse se concevoir — ne considèrent pas tous les Allemands (d’il y a 70 ans, comme de nos jours) comme des nazis.

Après tout, peut-être faut-il voir la démarche actuelle des négationnistes de la Shoah comme ciblant en premier lieu le Juif — au sens générique — c’est-à-dire le Juif partout dans le monde et à toutes les époques — pour le diaboliser et l’ostraciser à outrance. Cela pourrait conduire le monde entier à considérer les Juifs comme des «sous-hommes», un concept élaboré par Hitler et utilisé pour justifier la Solution Finale au problème juif. En conséquence, aussi paradoxal que ce soit, le négationnisme de la Shoah pourrait conduire à une autre Shoah.

N’est-ce pas là une excellente raison — sinon la meilleure raison — pour continuer à nous souvenir de la Shoah
? Et nous opposer aux négationnistes fomenteurs d’une nouvelle Shoah? Nous devons par ailleurs également continuer à rappeler le souvenir du génocide arménien, même si celui-ci ne semble pas faire l’objet d’autant de contestation, sauf parmi les Turcs. Le même principe de commémoration en souvenir des victimes, quelles qu’elles soient, s’applique à tous les autres génocides connus. Même si le sentiment de lassitude et de découragement nous assaille, nous devons continuer à témoigner sans relâche, aussi longtemps que des individus essayeront d’affirmer que la Shoah n’a jamais eu lieu. Il est de NOTRE devoir, en tant qu’êtres humains dignes, de tout faire pour démontrer que le drame de la Shoah s’est bien produit, car bientôt, les derniers témoins encore vivants de cette catastrophe seront tous partis.

Isaïe 63:9
Dans toutes leurs détresses, il a souffert avec eux, et l’ange qui est devant lui les a sauvés.
C’est lui-même qui les a rachetés, dans son amour et sa compassion, et constamment, par le passé, il les a soutenus et portés.   

jeudi 21 janvier 2016

LA FAUSSE « CONCURRENCE » VICTIMAIRE. Et s’il y avait 10 000 actes anti-musulmans en France ?

Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a dévoilé les chiffres des actes racistes en France en 2015. Il s’est inquiété notamment du « triplement » des actes anti-musulmans dans le pays, qui ont atteint le chiffre de 400 (recensés par la police). Bien entendu, le ministre a souligné l’importance de cette évolution consternante en ce qui concerne le racisme à l’encontre des musulmans de France.
Par ailleurs, il notait le niveau encore très élevé de l’antisémitisme en dépit d’une baisse de 5 % des actes recensés. Le niveau reste à 806 actes dénombrés.
Relatif aux actes contre les chrétiens, il est aussi en forte hausse (+ 20 %) avec 810 actes comptabilisés.


L’accent a donc été mis sur cette hausse « spectaculaire » des actes racistes contre la communauté musulmane. Monsieur Cazeneuve l’explique notamment par les conséquences des actions terroristes de janvier et novembre 2015, faites au nom de l’islam.
Quoique l’ensemble de cette délinquance raciste soit désolante et démontre l’échec patent, du moins en partie, de notre politique et de la promotion des valeurs républicaines, il convient de remettre les chiffres dans une juste perspective.
En effet, si l’on rapporte les actes délictueux relevés à la population musulmane, juive ou chrétienne, on devrait s’alarmer d’une autre façon. Non que cela excuse ou efface les faits, mais cela donne une idée plus exacte du sentiment d’insécurité réel et ressenti de telle ou telle communauté.
Si l’on considère la population musulmane de France, estimée à environ 6 millions (certains l’estiment plus proche des 10-12 millions), les chiffres du ministre donnent une proportionnalité de 1 acte pour 15 000 individus. Pour la communauté juive, estimée à environ 500 000 personnes, cette même proportionnalité est de 1 acte antisémite pour 620 individus. On peut donc ainsi affirmer qu’un Juif a au moins 24 fois plus de « chance » d’être victime du racisme qu’un musulman. En matière de ressenti d’insécurité, il faudrait plus de 10 000 actes anti-musulmans par an pour qu’un musulman « perçoive » en quelque sorte les mêmes « craintes » qu’un Juif. On en est très loin. Qu’en conclure au-delà des chiffres ?
On peut s’inquiéter bien sûr d’une manière générale de la croissance de ce racisme d’où qu’il vienne, mais l’urgence des mesures prises ne respecte en aucune façon la réalité proportionnelle des actes pour les différentes communautés visées.
En outre, j’ajoute qu’il serait forcément embarrassant, voire contre-productif, pour le ministre de reconnaître que l’essentiel des actes racistes, notamment contre les Juifs, provient de la communauté arabo-musulmane. D’autant plus que par ailleurs, la démarche générale des médias, des représentants musulmans, comme des politiques, est avant tout de présenter la communauté musulmane en victime principale de ce racisme. Tout est fait alors pour « concurrencer » le statut victimaire de la communauté juive, de loin la première visée par le racisme. Les chiffres ainsi rendus, sans perspective, tendent à accentuer ce statut de « victime » de la communauté musulmane en comparaison de groupes religieux « concurrents ».

Sans aucun doute, notre pays est malade de sa haine des autres et s’il est assez facile de reconnaître que les actes à l’encontre des musulmans sont en partie la conséquence directe des actions terroristes revendiquées au nom de l’islam, l’antisémitisme a lui de multiples sources bien plus enracinées. Il est infiltré dans toutes les couches de la société et se propage de façon sournoise depuis des années par les médias et les discours politiques ambigus, ou non ambigus. Personne n’ose affirmer trop fort que dans l’islam, la haine des Juifs est la règle et non l’exception. Des propos qui, aujourd’hui en France, seront qualifiés d’islamophobes et condamnés comme tels. Il n’est donc dès lors pas étonnant que cela se traduise par des actes violents, tels que ceux recensés par les autorités de police.
Le rapport du ministre, au-delà de l’énoncé brut des chiffres, tente maladroitement de créer un « équilibre », ou plutôt un « déséquilibre » en faveur des musulmans afin d’éluder le problème. Les mesures à prendre par les autorités ne pourront être adéquates que si celles-ci acceptent le « diagnostic » évident qui crève les yeux de beaucoup de nos concitoyens.

Mais il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir…

lundi 18 janvier 2016

« Kippa or not Kippa : comme Juif “montre” la Torah ! »

La dernière attaque en date d’un professeur juif se rendant à son établissement par un jeune de 15 ans et muni d’une machette a suscité l’indignation certes, mais surtout une polémique étrange autour du fait que la « cible » ait été identifiée par sa kippa sur la tête.


Fort heureusement, cette agression ne s’est pas terminée aussi tragiquement qu’on aurait pu l’imaginer, quand on considère la longueur de la lame de cette arme. Ironiquement et peut-être aussi symboliquement, l’homme s’est défendu au moyen du gros volume de la Torah qu’il tenait en main.

Ce qui a particulièrement choqué et surpris l’opinion et les autorités judiciaires, c’est la jeunesse de l’agresseur (à peine 15 ans), sa détermination à tuer et sa « honte » de n’avoir pas réussi à décapiter le professeur juif qu’il visait. Hélas, les agressions de ce type sont devenues presque banales (la troisième du genre en trois mois rien qu’à Marseille). Le plus inquiétant encore est l’absence d’éléments et/ou d’antécédents permettant d’identifier clairement d’autres terroristes potentiels et prévenir d’autres attaques. À ce stade, il est clair qu’il y en aura d’autres qui ne se termineront pas toujours aussi « bien ».

Dans ce contexte est née une polémique venant d’une autorité religieuse juive de Marseille recommandant de ne pas porter (au moins pendant un temps) de kippa en public. Alors bien sûr, on peut comprendre les craintes et le souhait légitime de ne plus servir de « cible » trop facilement identifiable dans les rues de la ville. Mais est-ce vraiment LA solution au problème ? N’y a-t-il pas dans cette louable intention un piège dans lequel ce rabbin est « tombé » sans s’en rendre compte ?
L’affaire de la kippa pose en réalité une grande question de fond et traduit le malaise de la communauté juive de France placée à la croisée des chemins.
Pour ceux qui ont choisi de quitter le pays et faire leur « alya » vers Israël, la réponse est claire. L’affirmation de leur identité, en tant que Juif, n’est plus possible en France dans les conditions actuelles sans crainte pour leur sécurité. Vivre sa foi et son identité comme Juif est devenu une entreprise dangereuse et, en dépit de l’attachement et des liens forts qui les relient à la communauté nationale, ils préfèrent faire le choix de rejoindre Israël. Non que les Juifs y soient en parfaite sécurité, mais au moins, ils y sont compris dans leurs préoccupations quotidiennes avec plus d’acuité.



Le port ou non de la kippa dans l’espace public n’est bien évidemment pas qu’une question d’ordre religieux ou de « visibilité » de son identité devant tous. L’enjeu est d’une autre nature. La laïcité et la liberté que nous accordent nos institutions permettent normalement aux Juifs de porter une kippa dans les rues où que ce soit. Devoir s’en priver, quelle qu’en soit la raison, est, à dire la vérité, un recul de nos libertés et une atteinte grave aux fondements de la République.
L’affaire, au-delà du « bruit » médiatique qu’elle a suscité, a surtout révélé la fracture existante dans le pays entre ceux qui se refusent à la « soumission » au diktat des terroristes islamiques et ceux qui en profitent pour stigmatiser un peu plus une communauté de plus en plus marginalisée. C’est ainsi que R. Brauman (ancien président de MSF) a semblé établir un lien bien étrange entre le port de la kippa et une prétendue allégeance à la politique de l’État d’Israël. Peut-on imaginer plus stupide proposition ? Sinon sous l’inspiration de pensées nauséabondes qui en disent long sur le cœur de ceux qui profèrent de telles insanités.
Fort heureusement, l’identité juive ne se résume pas au seul port de la kippa, mais il apparaît insupportable aux Juifs que des circonstances dramatiques ou des individus viennent « dessiner » pour eux ce que le Juif est ou n’est pas au travers de ses signes « visibles ». Il est une époque pas si lointaine où l’on a imposé aux Juifs un signe « distinctif » — l’étoile jaune — pour qu’il soit possible d’identifier sans se tromper un Juif, quel qu’il soit.
Et dans ces années-là, ceux affublés d’une étoile jaune sur la poitrine ne portaient pas tous de kippa. Ils n’étaient pas « plus » ou « moins » juifs que ceux qui en portaient. Et tous ont été finalement déportés. Or, c’est aux seuls Juifs de définir ce qui les identifie, sans laisser à d’autres, par ignorance ou par haine, le choix de les stigmatiser.

Aujourd’hui, un Juif qui porte ou qui ne porte pas de kippa est toujours un Juif. En France, il doit pouvoir afficher sans crainte et sans honte sa judéité, avec ou sans kippa.
Reculer sur cette question, c’est faire le premier pas vers une soumission, telle qu’elle existe pour les dhimmis[1] en terre d’islam.
Que chacun donc porte sa kippa comme il l’entend et se défende, à l’instar de ce professeur, avec la puissance de la Torah. En définitive, plus que cet enseignant, c’est peut-être bien elle qui a finalement été visée et « blessée ». Plus encore que la kippa, c’est bien la Torah que je « montrerai » dans la rue, par ma vie et par mes actions.



[1] Il s’agit du statut des non musulmans en terre d’islam (essentiellement les chrétiens et les Juifs). Cette soumission à l’islam comporte de nombreuses mesures discriminatoires, d’injustices et d’humiliation.